Région et changement climatique


Réflexions sur le sommet de Copenhague 
par Jean Claude GOUZE

Chacun le sait, la conférence sur le climat, dit sommet de Copenhague (officiellement la 15ème conférence des parties de la Convention-Cadre des Nations-Unies sur le Changement climatique, soit la COP15 de la CCNUCC) s’est tenu à Copenhague, du 7 au 19 décembre dernier.

Cette conférence s’inscrivait dans un processus, vieux maintenant d’une vingtaine d’années, dont on peut rappeler quelques dates-clés :
  • 1988 : création du GIEC, groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat
  • 1992 :sommet de la Terre, à Rio de Janeiro, créant en particulier la CCNUCC (1)
  • 1997 : signature du protocole de Kyoto
  • 2005 : entrée en vigueur de ce protocole de Kyoto
Dans l’intervalle, le GIEC (dont les travaux et les conclusions sur la réalité et la quantification du réchauffement climatique emportent l’adhésion d’une part désormais écrasante de la communauté scientifique internationale) obtient le Prix Nobel de la Paix.

L’objectif de Copenhague était la mise sur pied d’une planification mondiale de la lutte contre le réchauffement climatique. Il s’agissait aussi de prendre le relais de Kyoto, contraignant mais modeste, dont l’engagement de réduction des GES (2) de 5% par rapport à 1990 par les pays riches court jusqu’en 2012.

Qu’est-il advenu in fine de ce sommet de Copenhague ? De quoi ont accouché les 12 jours de discussion ? En fait, d’une simple déclaration de 3 pages, dont la teneur marque le grave fiasco des chefs d’état présents, et dont le statut juridique est ambigu :
  • texte non consensuel, approuvé par seulement une trentaine de pays
  • mention de la nécessité de limiter à 2°C le réchauffement global en 2050
  • pas d’aspect contraignant ni de quantification des efforts nécessaires de réduction des GES
  • pas de prorogation du protocole de Kyoto
  • simple demande de ‘communication’ tous les 2 ans par les pays émergents de leurs actions d’atténuation des GES
  • pas de quantification à long terme de l’aide financière aux pays du sud
  • marginalisation de l’Europe, empêtré dans ses contradictions et ses égoïsmes
Le décalage est grand avec les attentes et les enjeux. Si l’on considère le projet des écologistes (Les Verts, la société civile), ou même la résolution adoptée peu avant le sommet par le parlement européen, le compte n’y est pas. Il aurait fallu en particulier :
  • des objectifs chiffrés et contraignants pour la limitation à 2°C du réchauffement planétaire en 2050
  • l’objectif de diminution de l’émission de GES de 30 à 40% (par rapport à 1990) pour les pays industrialisés à l’horizon 2020
  • la reconnaissance de la dette écologique envers les pays du sud par l’affectation d’une aide supplémentaire de l’ordre de 100 Mds d’euros annuels jusqu’en 2020 (30Mds d’euros dit la résolution parlementaire)
Comme le dit par exemple Yves Cochet : « Il n'y a pas d'accord de Copenhague, seulement une déclaration politique indigente [..] sans force juridique, sans solidité financière»(3). D’autres, comme Hervé Kempf, veulent rester optimistes, jugeant positifs à la fois l’engagement des pays dits émergents, et la mention explicite de la limite à 2°C du réchauffement planétaire (4).

Le problème est en tout cas posé de l’après-Copenhague. Des réunions prochaines sont bien sûr programmées à Bonn courant 2010 et à Mexico en décembre, mais aucun optimisme délirant n’est pour l’instant à l’ordre du jour.

La réflexion au niveau européen doit peut-être se porter de façon plus offensive sur la possibilité d’une éco-conditionnalité à l’échelle continentale, l’instauration d’un type de taxe carbone aux frontières de l’Europe. Ne devrait-on pas maintenant jouer de manière plus assumée la confrontation des modèles économiques, sociaux, et environnementaux ?


Mais que faire, en France et à notre niveau ?


En parallèle de la pression qui ne doit pas se relâcher aux niveaux européen et mondial, nous pouvons agir et donner l’exemple dans les régions.

Il devrait être temps de faire émerger, à défaut pour l’instant d’une ‘‘sagesse des nations’’, une sorte de ‘‘sagesse des régions’’. Les élections régionales se profilent (14 et 21 mars 2010). Pascal Canfin affirme : « Plus de la moitié des objectifs qui auraient pu (et dû) être fixés à Copenhague relèvent des compétences des collectivités territoriales» (5).

Effectivement, à partir des prérogatives qui sont les siennes et de celles dont elle peut se saisir, en particulier par une vraie politique des transports, une promotion de l’agriculture paysanne et des circuits courts, la relocalisation, l’application d’une éco-conditionnalité des projets, … la région peut viser une sorte de Copenhague régional (exemplaire cette fois).



Je formule le vœu que les électeurs franchissent le pas et accordent enfin du leadership à la mouvance écologiste, représentée par les listes Europe Ecologie (EE). Cette mouvance écologiste est la seule qui peut se prévaloir des 3 points suivants :
  1. conscience claire de la hauteur des enjeux
  2. possession du bon ‘logiciel’ : la conversion écologique de la société
  3. une grande expertise (acteurs de terrain, experts et spécialistes dans tous les domaines prégnants)
J’émets également l’idée que pourrait se former après les élections un Comité Inter-Régional sur le Changement Climatique pour échanger, coordonner, mutualiser. Contribuant à faire émerger ainsi l’idée, dans une France trop jacobine, de régions-puissances.

Je termine en disant qu’il faut affirmer et montrer que l’écologie politique est avant tout sociale : la préoccupation première concerne les plus défavorisés, mais qui plus est en prenant en compte l’interdépendance des différents domaines (la conversion écologique de l’économie favorise l’emploi, la revitalisation de l’espace rural et les circuits courts favorisent le maintien de services publics, de vraies politiques des transports et d’efficacité énergétique augmentent le pouvoir d’achat, …)

Plus que jamais en 2010, faisons donc notre le slogan fameux : « penser global, agir local ».

Jean-Claude GOUZE

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